Un secteur en quête de talents
Ces dernières années, la filière de l’eau fait face à un déclin des inscriptions dans les formations spécialisées et à une pénurie croissante de diplômés. Dans le contexte actuel où la gestion des ressources en eau devient une problématique majeure, tant pour les acteurs publics que privés, la difficulté de recruter des spécialistes du secteur de l’eau ajoute un défi supplémentaire. Avec environ 20 000 services publics d’eau en France, la nécessité de trouver des solutions innovantes et efficaces à ce déficit est plus pressante que jamais.
Baisse des candidatures : un défi pour le recrutement
Le secteur souffre d’un désamour en France pour les formations techniques au profit d’études plus théoriques, exacerbant les tensions sur le marché du travail. Le BTS Gestion et Maîtrise de l’Eau (GEMEAU), un diplôme reconnu par le ministère de l’Agriculture, illustre parfaitement cette baisse de candidatures. Malgré une bonne représentation nationale, avec 32 établissements proposant une quarantaine de programmes différents, à la fois en formation scolaire et en apprentissage, le nombre de candidats a chuté de près de 40%, depuis 2010. Le nombre de candidats s’élevait entre 800 et 850 en 2010, il n’est plus que de 538 en 2023.
En complément, le BTS « Métiers de l’eau » de l’Éducation nationale a vu son plus faible nombre de diplômés depuis sa création, soit 147 diplômés pour 32 établissements. Cette tendance révèle un désintérêt croissant pour les carrières liées à l’eau, exacerbé par un secteur sous tension et méconnu du grand public.
Quelles solutions ?
1. Adopter les nouvelles technologies
Les nouvelles technologies dans le domaine de l’eau comme l’IA et le suivi en temps réel des informations sur le cycle de l’eau permettent d’anticiper les défaillances. Cela limite les interventions humaines lors des astreintes par exemple, point délicat à gérer pour les agents en poste, en particulier les nuits et week end. Utiliser les nouvelles technologies dans les processus de formation et mettre en place de nouvelles modalités de formation en e-learning et blended learning permet de former rapidement et efficacement les nouveaux embauchés, tout en proposant des formations continues aux employés actuels. Cela contribue à leur développement professionnel et personnel, un autre point important pour fidéliser les employés des services d’eau .
Les plateformes en ligne, comme celle de Watura, représentent un moyen innovant pour rendre la formation plus accessible et attrayante pour préparer la main-d’œuvre actuelle et future aux défis du secteur.
2. S’inspirer des initiatives à l’international
Le Québec est également confronté à un déficit d’employés qualifiés, avec moins de 75 candidats diplômés annuellement et une nécessité de remplacer 28 % de la main-d’œuvre entre 2020 et 2024. Le Québec met en œuvre des stratégies de recrutement international (il existe un ARM – Arrangement de Reconnaissance Mutuelle – pour les diplômes BTS Français et les DEC Québécois) et renforce la visibilité des métiers de l’eau dans les écoles à tous les niveaux comme par exemple l’installation de bornes interactives avec des films 3D de différents métiers de l’eau dans les classes primaires et secondaires. Cette approche offre des pistes précieuses pour la France, soulignant l’importance d’engager la nouvelle génération et de valoriser la diversité des carrières dans ce secteur.
3. S’engager pour la transition écologique
Les métiers de l’eau sont au cœur de la transition écologique, nécessitant des professionnels qualifiés et passionnés par la préservation de notre ressource la plus précieuse. L’engagement envers l’innovation et la formation continue joue un rôle clé dans l’attraction de talents motivés par un impact environnemental positif.
4. Renforcer les partenariats stratégiques
Par le renforcement des partenariats, une approche collaborative permet non seulement de mieux aligner les programmes de formation avec les besoins réels de l’industrie, mais également d’offrir des opportunités de stages, d’alternance et de première embauche pour les étudiants intéressés par le secteur.
5. Dépasser les idées reçues
La méconnaissance des métiers de l’eau par les élèves des classes de primaire et des collèges (et leurs parents) est un obstacle majeur à leur attractivité. Des initiatives innovantes pour la formation et la sensibilisation, ainsi que des efforts pour améliorer la visibilité et la valorisation des carrières dans ce domaine, sont essentielles pour valoriser les parcours professionnels dans le secteur.
Réinventer la formation aux métiers de l’eau
La crise des compétences dans le secteur de l’eau exige donc une réponse multidimensionnelle. L’enjeu réside dans l’harmonisation des innovations technologiques et pédagogiques avec une valorisation des carrières dans l’eau.
En intégrant des solutions telles que les plateformes e-learning et en promouvant l’importance des métiers liés à l’eau, il est possible de susciter un intérêt renouvelé et une passion pour ces carrières. Par ailleurs, l’engagement en faveur de la transition écologique devient un moteur puissant pour attirer une nouvelle génération de professionnels déterminés à faire face aux défis environnementaux. En définitive, surmonter cette crise des compétences demande une vision à long terme et une volonté collective de réinventer les parcours professionnels dans le secteur de l’eau. Il est aussi important d’avoir, pour une formation adaptée, des référentiels de métiers acceptés par tous : à la fois les acteurs privés et publics.
Par Marie David.
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